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Chapitre III- Visite avec le capitaine


          N'ayant pas de but précis, je m'en retournais vers l'avant du pont. La timonerie se trouvait là-bas et le capitaine ne devait pas s'en trouver loin. Une petite barrière séparait l'espace réservé à la première classe de celui de l'équipage. Fermé à clé, j'appelais un officier non loin de là. Il s'approcha.
          -Second officer Lightoller, What can I do for you, sir ?
          Oh, excusez-moi, pour les besoins de l'histoire, je ferais dorénavant parler mes personnages en français. Sachez qu'à bord du Titanic, l'Anglais était de rigueur. Seul 39 français, passagers ou membre d'équipage participaient au voyage. Reprenons...
          -Second officier Lightoller, que puis-je faire pour vous, monsieur ?
          -Bonjour, j'ai reçu une invitation du commandant, monsieur. Je cherche à le rejoindre.
           -Faites-moi voir cette invitation.
          Je lui montrais le carton. Il ouvrit le petit portail et par une porte, il me fit entrer dans le quartier des officiers. La petite coursive était semblable à celle qui menait à ma cabine.
          -Ou êtes-vous installé ?
          -Tout près, monsieur, la cabine de première classe X.
           -Effectivement. Vous pourrez y accéderez par cette porte, sur la droite, au bout de la coursive.
           Je savais désormais ou menait cette porte au-dessus de laquelle était indiqué « crew only » à droite de la porte de ma cabine. Cependant, nous tournions le dos à cette issue pour nous rendre vers l'extrême avant du pont. Nous arrivions, au bout de la coursive dans une pièce, assez étroite, ou trônait au centre, une roue de gouvernail. Ce devait être la timonerie, bien-sûr. Les cinq fenêtre à l'avant ouvraient sur une autre pièce, apparemment ouverte ou une deuxième roue était dans la lignée de la première, parfaitement centrée.
Nous traversions la pièce pour passer du côté bâbord au côté tribord du navire. De là nous sommes entré dans une pièce bien plus petite que la timonerie. Une table surchargée de carte et un canapé y tenaient à peine. Une seule autre porte, exceptée l'accès à la timonerie permettait de sortir de cette pièce. Lightoller frappa doucement à la porte.
          -Commandant ? Charles de Morvan pour vous.
          La porte s'ouvrit laissant apparaître un visage encadré d'une barbe blanche. Lightoller termina.
          -Je vous laisse, bonne continuation. Commandant.
          Il salua l'homme à la barbe blanche qui me fit entrer avant de refermer la porte.
          La pièce était large et accueillante. Un fauteuil encadré de deux armoires couvraient le mur du fond alors qu'une large bibliothèque leur faisait face contre le mur opposé. Une petite table accompagnait le canapé. Au-dessus, deux fenêtres offrant une vue sur le pont avaient-été percées. Un bureau avait été installé contre le mur ou se trouvait la porte par laquelle je venais de passer. Un baromètre et une horloge était accroché au mur. Le commandant m'invita à m'installer sur le canapé. Pour y accéder, je devais marcher sur un large tapis. En me voyant l'observer, le commandant cru bon devoir ajouter :
          -Axminster. Une valeur exceptionnelle.
          Il vint s'asseoir à ma gauche. Sur le mur à ma gauche, une porte faisait face à celle par laquelle j'étais entré. A sa droite, un rideau devait déboucher sur un autre placard.
          L'homme me dévisageait. D'aussi près, je voyais de profonds sillons astucieusement cachés par la barbe du capitaine qui, visiblement n'était pas à sa première traversée. Il parla en premier.
           -Monsieur de Morvan. J'ai reçu un télégramme d'un journal breton l'Ouest-Eclair. Vous travaillez pour eux il me semble ?
          -Effectivement oui. Je n'arrivais pas à déceler dans ses yeux si c'était un reproche ou non.
          -Vous avez été mandaté pour dresser un rapport sur la vie et les équipement de ce navire, n'est-ce pas ? Comment compté-vous vous y prendre ?
          -Et bien, commandant...
          -Je vous propose une petite visite du quartier des officiers, pour commencer. Nous aviserons pour la suite. Cela vous convient-il ?
          -Je n'osais vous le proposer, monsieur ! Merci, merci infiniment.
          Le vieux capitaine esquissa un sourire. Il reprit.
          -Vous êtes ici dans l'une des trois pièces qui me sont exclusive. Traditionnellement, mes quartiers se trouve à tribord. Si le moindre soucis se déclare, je suis en un instant sur le pont en passant par la salle des cartes que vous avez traversé. Dans ce salon, je peux y passer mon temps libre ou recevoir, comme maintenant des invités. Cette porte, il me montra celle à côté du rideau, mène à la coursive que vous avez traversé, certainement du côté bâbord puisque vous êtes arrivé par la salle des cartes. Derrière ce rideau, vous avez ma chambre, suivez-moi.
          Je passais, après le capitaine, derrière le rideau qui ne menait pas à un placard comme je l'avais cru mais, effectivement, à une véritable chambre.
          La pièce était plus petite que le salon que je venais de quitter. Elle était lambrissé en bois de chêne sur toute la partie inférieur des murs, le dessus était peint en blanc. Une fenêtre perçait le mur extérieur. Sur le mur face à moi, une porte était fermée. Un lit occupait le mur, sous la fenêtre, contre le mur extérieur. Entre lui et la porte, un bureau venait occuper l'espace restant du mur, face à moi. Il était équipé de sept tiroirs et d'un miroir pivotant au-dessus.
          -Je passe la plupart de mes nuits ici-même, me dit la capitaine, visiblement heureux de faire visiter ses appartements. En tant que commandant de ce navire, je n'ai pas a respecter de quart sur la passerelle. Mes nuits sont donc, sauf incidents, complètes.
          Il me gratifia d'un clin d'oeil, avant de se diriger vers la porte fermée. Nous arrivions dans une petite salle de bain.
          -Très semblable à toutes les salles de bains de première classe, la mienne est équipée d'une baignoire, d'un toilette et d'un lavabo Doulton. Vous avez ici une armoire à pharmacie avec une porte miroir, très utile et... Dites-moi, vous ne prenez pas de notes ?
          -Je trouve cela impoli pour la personne qui me donne ses explications, monsieur. Rassurez-vous, je prendrais note de tout ce que vous m'avez raconté lorsque nous aurons terminé notre rencontre.
          -Et bien, nous en avons terminé de la visite de mes appartements, je vous propose de continuer si vous le voulez bien. Passons par cette porte qui mène à la coursive. Je me suis, d'ailleurs, toujours demandé pour avoir installé une porte manant à ma salle de bain. Enfin, l'esthétique, j'imagine.
          Alors que je sortais dans la coursive accompagné du capitaine, un officier vint à notre rencontre.
           -Boxhall, dit le capitaine, je vous présente monsieur de Morvan, journaliste français à bord.
          -Quatrième officier Joseph Boxhall, monsieur, à votre service.
          -Bonjour répondais-je.
          Le capitaine reprit:
          -Quelles sont les nouvelles ?
          -Justement, répondit Boxhall, Mr Wilde à prit son quart, il voudrait vous entretenir.
          -14 heures, déjà ? Oh, mon dieu, que le temps passe. Dites-lui que j'arrive le plus vite possible.
          Le jeune officiers s'en allait prévenir son supérieur d'un pas précipité.
          -Et bien, monsieur de Morvan, je crois bien que nous allons devoir remettre la suite de notre petite visite. Revenez donc vers dix-sept heures trente, nous achèverons notre visite et vous resterez avec nous pour l'arrivée en rade de Cherbourg. La vue, de la timonerie est imprenable.
          -Bien, parfait. Merci monsieur, de m'accorder de votre précieux temps. Je serais présent à 17h30, je vous remercie.
          -Pas tant de remerciement, vous allez me faire rougir. Répondit le capitaine, souriant franchement.
          Il s'en alla d'un pas tranquille en direction de la timonerie.
          Je prenais une coursive latérale m'emmenant du côté bâbord du navire, de là, je tournais à gauche et, au bout de la coursive, prenait la dernière porte à droite, que m'avait indiqué le deuxième officier qui m'avait conduit au commandant. Effectivement, je revenais dans la coursive depuis laquelle j'accédais à ma cabine. Je m'y rendais et prenait en note sur un bout de papier toute les informations fournies par le capitaine en décrivant du mieux possible les pièces que je venais de découvrir..
          Mon ventre commençait à gronder et je me demandais soudain s'il était possible de manger à cette heure sur ce paquebot. La chaleur dans la cabine était intenable, j'ouvrais la fenêtre et ouvrait le livret que l'on m'avait donné à mon embarcation. Je le feuilletai pour trouver les horaires de la salle à manger. Celle-ci restait disponible jusqu'à 14 heures 30. Je voulais prendre mon temps pour ce premier repas. Je n'avais pas le choix cependant. Alors que je m'apprêtais à refermer le livre, je lus, « En plus de la salle à manger, le restaurant à la carte... » Je regardais de plus près et vu que ce restaurant, au pont B, était ouvert en permanence entre 8 heures et 23 heures. C'était décidé, j'irais déguster mon premier repas là-bas. Je refermais la fenêtre et sortais de la cabine.
          Je prenais le chemin du grand escalier. Je commençais à me repérer dans cette première coursive et arrivait sans encombre sous le puits de lumière offert par la verrière. J'entamais la descente vers le pont A mais au demi palier, je découvris une horloge fantastique. Du moins, fantastique étaient la sculpture qui l'entourait. En approchant son oreille, on pouvait entendre le cliquetis du mécanisme. Un passager qui montait du pont inférieur, s'arrêta à ma hauteur.
          -L'honneur et la gloire couronnant le temps. Merveilleux ouvrage n'est-ce pas ?
          -Fascinant, je trouve aussi.
          -Je me présente, Franck Brown.
          -Charles de Morvan, vous êtes jésuite, non ? J'ai écris un article qui vous mentionnait un jour.
           -Vraiment ? Oui, effectivement. Je profite des escales du Titanic pour retourner en Irlande. Je débarquerais demain, à Queenstown. J'en profite pour prendre le plus de photos possible de ce transatlantique de légende. Bien que les navire le surpasseront en taille dans le futur, je pense que le Titanic sera toujours une légende.
          -Je n'en doute pas, seulement, les pensées des gens évoluent avec le monde, le Titanic sera une vieille dame dans quelques années. Vous remarquez que l'on ne parle déjà plus de l'Olympic ou uniquement pour mentionner son abordage.
          -Vous n'avez pas tord, je dois bien l'admettre, en attendant profitons de cette vieille dame. Monsieur.
          -Bonne journée à vous, mon père.
          Alors qu'il montait au pont des embarcations, je descendais au pont A, puis au pont B. J'allais à la rencontre d'un steward qui se dirigeait vers les ascenseurs. Je lui demandais ou se trouvait le restaurant à la carte. Il m'indiqua l'une des deux doubles portes que j'avais remarqué à mon arrivé sur le navire, face à l'escalier. Le restaurant à la carte était apparemment de l'autre côté. J'ouvrais l'un des battants de la porte. Loin du restaurant à la carte, je me retrouvais dans une longue coursive dont je ne voyais pas le fond. J'entamais la marche à travers elle, porte et petites coursives perpendiculaires se succédaient avec une régularité déconcertante. Je marchais droit devant moi. Cette coursive était vraiment incommensurable. J'arrivais enfin au bout, ou une autre double porte m'attendait. 

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